La Rencontre / Jinny Xie

Jinny Xie, orgue, clavecin, piano

œuvres de Frescobaldi, Böhm, Rameau, Scarlatti, Couperin, Mozart, Beethoven, Chopin, Grieg, Debussi, Chabrier

#TAC 052

 

 


Comme une sorte d’ouverture, une invitation au pur plaisir de la musique, Frescobaldi nous charme d’emblée, à l’orgue, avec le thème d’une chanson italienne la Monica. Cette introduction séduisante et doucement lyrique donne ainsi le ton de cet album, entièrement placé sous le signe de l’émotion.


Certes il s’agit ici, de la rencontre entre deux instruments, clavecin et piano, qui n’ont rien en commun (sinon un clavier) et que leur répertoire dans le temps a achevé de séparer. Et pourtant, grâce à Jinny Xie, leur rencontre se révèle riche en idées musicales et philosophiques. Chez cette artiste, la mise en parallèle de ces deux instruments provoque une émotion « en miroir », qui la renvoie donc de l’un à l’autre. Cette dialectique qui oppose la voix calme et stable du clavecin, au dynamisme du piano, lui permet d’exprimer les équilibres de la rationalité et de la sensibilité qui marquent aussi bien la musique baroque, que classique, romantique ou encore moderne. En d’autres termes une sélection d’œuvres pour clavecin
et pour piano, bien choisies par Jinny Xie, malgré leur contraste sonore montrent la même préoccupation de concilier raison et sentiments, ou encore d’opposer la rigueur de l’académisme, à l’inspiration libre.
Un attachement à la forme ou à un plan immuable, celui de la Suite de danses françaises par exemple relève, en effet, du rationnel. S’en remettre à la raison et placer sa musique sous le joug d’une idée littéraire ou poétique, qui canalise toujours l’émotion procède de la même démarche. De même, admirer les vertus très françaises de concision, de pudeur et de clarté tempère les élans et les interrogations personnels. Scarlatti quant à lui, n’a pas son pareil pour bâtir ses sonates sur un seul et immuable principe de composition, soit technique, soit esthétique. Pour les romantiques et les modernes, le passé s’invite partout et chacun lui paye son tribut de respect aux règles et à l’ordre en s’inclinant devant Bach ou Mozart.

Mais la musique est le langage du cœur, l’inspiration, l’imagination l’emportent toujours. Il n’est plus question de raison, quand la virtuosité devient un moyen d’expression, quand le souffle poétique d’une atmosphère particulière, ou un sombre état d’âme secoue toute une sonate, quand l’évocation d’un paysage, d’un souvenir, sert de prétexte à des accents poignants de nostalgie ou de tristesse. Quand la recherche d’effets spéciaux dicte l’écriture.
Jinny Xie rappelle, que les traditions ne cessent de se croiser ou de se fondre, sous la plume de ces savants poètes que sont les compositeurs. La subtilité et la grâce reviennent à l’interprète. La confrontation se transforme alors en complicité.